Les enseignants sont-ils voués à devenir des traqueurs d’IA ?

Les collégiens, les lycéens et les étudiants utilisent l’intelligence artificielle (IA) pour un devoir à rendre qu’il s’agisse de répondre à des questions à choix multiples (QCM), solutionner un problème posé ou encore rédiger instantanément des textes sur n’importe quel sujet. Ce qui pose problème c’est l’utilisation de l’IA par l’élève pour remplacer entièrement son travail, dans le but d’obtenir une bonne note sans se fatiguer. Comment les professeurs, dans ces conditions, peuvent-ils évaluer les copies rendues ? Vont-ils se transformer en chasseurs de fraudes grâce à des logiciels détecteurs d’IA ?   Sont-ils voués à instaurer un climat de suspicion constant et à perdre leur temps dans cette lutte ? La réponse est non, car il y a des solutions pour faire bon usage de l’IA. Les élèves et enseignants en sortiront gagnants.

L’enseignant évalue la compréhension des élèves pendant son cours grâce à l’IA

Il est intéressant pour le professeur de vérifier l’acquisition des connaissances et leur compréhension par les élèves pendant le cours car il peut y remédier immédiatement. L’enseignant pose une question simple sur ce qu’il vient d’expliquer via une application et les élèves répondent anonymement sur leur smartphone, tablette ou ordinateur. L’IA donne immédiatement le pourcentage de bonnes réponses. Si ce pourcentage est jugé non satisfaisant par l’enseignant, il réexplique la notion mal comprise puis la teste de nouveau. Au lieu d’une simple question, le professeur peut soumettre un QCM ou un exercice, générés par l’IA. (Kahoot ; Wooclap ; Crowdsignal ; Formative ; Evalbox)

L’enseignant montre aux élèves comment utiliser l’IA dans leurs révisions

Dans un premier temps, il serait utile d’enseigner aux élèves comment vérifier les données d’un texte totalement généré par l’IA. Mais ce qui est aussi intéressant, c’est d’enseigner aux élèves comment utiliser l’IA pour la relecture et la critique d’une dissertation ou d’un commentaire de texte qu’ils ont eux-mêmes écrits. En effet, l’argumentaire fourni par l’IA indique les points forts, les points faibles ainsi que les parties manquantes ou les erreurs de jugement. L’élève peut alors comprendre ce qui est à améliorer et pourquoi, puis revoir sa copie. Autre intérêt et pas des moindres, l’utilisation de l’IA pour réviser un sujet. Par exemple l’élève fait générer des QCM sur un sujet, répond et consulte la correction. L’IA est une assistance formidable car, comme tout système informatique, elle a une patience infinie. (Perplexity ; ChatGPT) (Wooclap ; Quizlet ; Crowdsignal ; Formative ; Evalbox ; Gauthmath)

L’enseignant développe les réalisations concrètes et le travail ensemble avec l’assistance de l’IA

Un domaine où l’IA est reléguée au rôle d’assistante, est celui de l’intelligence de la main. Déposer un vitrail sans le casser, le réparer, restaurer une peinture, créer une lutherie, poser une charpente au millimètre, bref tout ce que savent fabriquer les artisans compagnon, ne peut être totalement remplacé par l’IA. Cela fait tellement de bien au cœur humain de regarder faire la main humaine. Alors pourquoi se priver de réalisations concrètes dans l’enseignement général ? Faire dessiner puis fabriquer des objets grâce aux fablab présents dans l’environnement académique, comprendre et manipuler des appareils de mesure, concevoir puis réaliser des expériences en laboratoire de sciences, travailler en sciences participatives, réaliser des enquêtes sur le terrain et les analyser, réaliser des projets impliquant plusieurs matières pour exploiter pleinement le potentiel de l’IA dans l’éducation sont autant de domaines relativement inexplorés par les enseignants. Cela demande toutefois de savoir évaluer une équipe. (Padlet)

L’enseignant change de type d’évaluation

« Si mon exercice peut être fait par une IA, c’est qu’il n’était pas très intéressant ». En effet les IA sont des mémoires artificielles qui ont engrangé un nombre considérable de textes, d’images, et de sons. L’évaluateur doit donc se poser la question : « Qu’est-ce que j’évalue chez un élève ? Est-ce l’acquisition et la mémorisation de connaissances, la compréhension de connaissances, l’application de connaissances à une nouvelle situation, la capacité d’analyse d’une situation, la proposition de nouvelles solutions pour lever un verrou, ou encore la réflexion sur une hypothèse ? Quand un enseignant évalue un QCM (évaluation souvent faite d’ailleurs par un logiciel), ou des réponses à un sujet de cours, il évalue la mémorisation et la compréhension des connaissances acquises. Quand il évalue les réponses à un exercice, un problème posé, il évalue la capacité d’application des connaissances acquises dans un contexte nouveau. Quand il évalue les solutions à un problème complexe, il évalue la capacité d’analyse et d’innovation de l’élève. Profitons du problème de tricherie posé par l’IA pour évaluer les capacités cognitives de haut niveau des élèves plutôt que simplement leur mémoire et leur compréhension.

L’enseignant organise les devoirs en classe

Reste le problème et non des moindres, de l’utilisation de l’IA pour des dissertations et commentaires de textes faits à la maison. En effet le problème est double. Non seulement il est quelquefois difficile de repérer un devoir généré par l’IA mais aussi cela favorise chez l’élève le refus d’apprendre. Une solution pour l’enseignant est de vérifier par un examen oral la compréhension de la copie rendue. Une autre est d’organiser les dissertations et commentaires de texte uniquement en classe. Cela rétablirait une justice sociale car les devoirs à la maison sont source d’inégalité. Les élèves ne travaillent pas tous chez eux dans les mêmes conditions, ils ne sont pas tous installés sur un bureau, seul dans une chambre et en silence. Ils n’ont pas tous des parents ou des connaissances avec lesquels ils peuvent discuter et qui peuvent les aider. (Chatpdf : fournit une liste des questions sur un texte en format pdf)

En conclusion, l’IA est un outil intéressant dans l’enseignement à condition que les enseignants soient formés à s’en servir d’une façon bénéfique, éthique et responsable. Il s’agit aussi pour les responsables éducatifs de concevoir un plan d’intégration progressive de l’IA dans les programmes scolaires. Cela pourrait inclure des phases d’expérimentation, d’évaluation et d’ajustement des pratiques pédagogiques. Dans un prochain blog, différentes plateformes IA seront présentées en détail avec leurs particularités, leurs avantages ainsi que les biais algorithmiques. En attendant il vous est proposé ici quelques IA qui vont bien au-delà de ce qui est discuté dans ce texte ainsi que leur courte description (auteur : Jacques Baratti).

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